Pour t’aider à comprendre les enjeux du digital dans le monde qui t’entoure, nous avons réalisé une interview avec Michel Berne, économiste et enseignant d’Économie Digitale chez IMT-BS.
Michel Berne suit l’évolution de l’économie digitale depuis une vingtaine d’années, et nous permet dans cette interview, de comprendre les réels enjeux du digital dans le monde et dans une société transformée par celui-ci.
L’économie digitale : les nouveaux enjeux dans notre société et dans nos emplois
Comme tu le sais, les progrès technologiques évoluent très vite. L’intérêt du digital n’est pas qu’il évolue en permanence, mais qu’il a bel et bien des impacts dans toutes les activités humaines de notre société. L’impact de ces technologies n’est pas purement technique : il touche à la communication humaine et peut même concurrencer notre propre intelligence, nos propres emplois.
Souviens-toi du jour où le digital a impacté le métier de caissière ou caissier dans les supermarchés, par exemple. Les personnes qui exercent le métier d’hôtesse ou d’hôte de caisse se sont retrouvées en concurrence avec une machine, capable de communiquer avec une voix humaine, de te demander ta carte de fidélité lorsque tu règles tes courses, et d’encaisser, au même titre que la personne. Effectivement, être remplacé par une machine peut faire peur, voilà pourquoi des entreprises telles que Google, s’intéressent en ce moment même à la place de l’humain au sein de la transformation numérique.
Malgré cela, Michel Berne rappelle que le digital présente également de nombreux avantages.
Il promet en effet :
- d’accroître la croissance économique, c’est-à-dire la prospérité ;
- d’améliorer l’inclusion sociale, c’est-à-dire d’amener à une société plus solidaire ;
- d’accroître l’information grâce aux nouvelles technologies de l’information comme Wikipédia par exemple, qui s’avère être une encyclopédie universelle collaborative et multilingue ;
- d’améliorer en partie la transition environnementale en se déplaçant moins par exemple. Ce dernier impact peut cependant être négatif, puisque tout n’est pas encore entièrement dématérialisable et que la consommation d’énergie s’avère être assez conséquente.
Ces 4 promesses se développent selon deux modèles principaux. Le premier est le modèle commercial, avec l’utilisation des réseaux sociaux tels que Facebook, Instagram, Snapchat, ou encore Linkedin. Le second est le modèle libre, avec les sites internet tels que Wikipédia, ou encore les blogs des entreprises…
On a tendance à penser que le digital contribue significativement à la croissance économique. Pourtant, nos systèmes de mesure ne nous permettent pas de l’affirmer réellement.
“En 1987, Solow, grand économiste, disait : “on peut voir l’ère digitale partout, sauf dans les statistiques de productivité.”
“Et effectivement”, explique Michel Berne, “il y a une promesse énorme sur le gain de productivité, la promesse que nous allons travailler moins et produire plus par exemple. Pourtant, il est difficile de le voir dans les statistiques nationales.”,
Dans les années qui ont suivi, une controverse est apparue entre différents économistes, qui se sont penchés sur la question. Certains disaient que les résultats attendus de la part du digital ne se montrent pas, d’autres affirmaient que nous sommes à l’aube d’une révolution majeure mais qu’elle met du temps à se mettre en place et qu’il faut être patient.
Ce qui est sûr de nos jours, c’est que la technologie digitale impacte tous les secteurs, évolue rapidement, concurrence les compétences que nous avons en tant qu’humain, mais notre société ne se dirige pas vers une dématérialisation complète.
Certains métiers sont menacés par la transformation numérique (exemple de l’hôtesse ou l'hôte de caisse dans les supermarchés au début de l’article). Et parallèlement à cela, l’actualité nous montre plus que jamais l’importance des échanges et des rapports humains dans notre société et dans nos métiers. Car nous sommes les seuls à pouvoir innover, et c’est ce qui est désormais attendu en entreprise.
Les nouvelles compétences attendues en entreprise
“Quand le chemin de fer est arrivé, beaucoup de gens ont perdu leur emploi. Un certain temps est passé, ces personnes se sont reconverties, d’autres industries sont apparues et finalement tout le monde a retrouvé du boulot. Le schéma est le même”, illustre Michel Berne, “avec la digitalisation dans tous les secteurs, on attend des disparitions massives d'emplois. Cependant, si nous faisons cela de la bonne manière, ce sera douloureux, complexe, long, mais le monde se réorganisera et tout le monde retrouvera un emploi.”
La première réflexion sur l’évolution des métiers a été faite par Frey et Osborne en 2013. Dans leur étude, ils ont choisi plus de 700 métiers auxquels ils ont attribué trois notes :
- Intelligence sociale ? Y-a-t-il besoin de parler avec d’autres êtres humains dans ce métier ? (sur ce premier point, l’événementiel a une note élevée tandis que la comptabilité en a une faible) ;
- Créativité ? (sur ce second point, un métier dans un tribunal a une note faible mais un créateur de mode a une note très élevée) ;
- Perception et manipulation ?
Si un métier demande des interactions humaines, de la créativité et des compétences particulières en perception et manipulation, son risque de disparition est faible. Si au contraire, il demande peu d’intelligence sociale, de créativité ou de compétences particulières liées à la perception et manipulation, le métier est en danger.
Leur conclusion est la suivante : avec la transformation numérique, presque 50% des emplois risquent de disparaître ou ont une haute probabilité de disparition dans les années à venir.
Une étude de l’OCDE plus récente se penche sur le sujet et apporte des précisions. Elle met en avant le fait qu’un métier ne se caractérise pas uniquement par sa tâche principale, il est plus complet que cela.
“Prenez par exemple le métier de chauffeur routier”, explique Michel Berne. “Un camion pourra certainement se conduire de façon autonome un jour. Mais un chauffeur routier fait bien plus de choses que conduire, il s’occupe du déchargement, il est en relation avec telle ou telle personne. C’est donc plus compliqué de le remplacer.”
La bonne nouvelle pour les étudiants en école de commerce, c’est que la probabilité de disparition de l’emploi est d’autant plus faible lorsque l’on a une bonne formation. Même si avec l’intelligence artificielle aujourd’hui, des métiers très spécialisés peuvent se transformer. Par exemple une machine pourrait peut-être diagnostiquer les symptômes d’un malade un jour, mais pour aller expliquer la maladie à sa famille, aucune machine ne peut remplacer un véritable médecin.
Énormément de métiers sont touchés par le digital, mais ils ne vont pas disparaître, ils vont se transformer. C’est à ça que toi, futur étudiant en école de commerce, tu te prépares.
Uber est un bon exemple de transformation d’un métier. L’entreprise a permis au métier de chauffeur de taxi d’évoluer, puisque la machine (l’algorithme) a pris le dessus. Mais il n’a pas été question de supprimer l’humain dans cette évolution. Car s’il sera possible de programmer des voitures qui se conduisent seules un jour, il n’existera pas de voitures dotées de compétences sociales et humaines. Voilà pourquoi l’humain est indispensable et pourquoi les chauffeurs Uber sont aujourd’hui très nombreux : beaucoup d’emplois ont été créés.
Les compétences vont donc bel et bien changer. Et il te faudra allier compétences humaines et compétences digitales, qui te seront plus que jamais nécessaires.
Quelles sont ces nouvelles compétences ?
- compétences analytiques : je comprends la complexité du monde, j’ai une vision systémique du monde, je comprends et je sais analyser les situations, je sais établir un jugement… ;
- compétences humaines : c’est ce qu’on appelle les soft skills. C’est le leadership, le ressenti humain, le charisme, la sociabilité, l’adaptabilité… ;
- compétences techniques : il faut comprendre ce digital, comprendre ce qu’il peut faire ou non (controverse actuelle autour des algorithmes aujourd’hui par exemple, est-ce productif, est-ce néfaste ?...).
- compétences digitales : compétences opérationnelles, création de contenus de qualité, gestion de l’information.
À cela, l’enseignant ajoute que “Finalement, une personne lucide, qui a une vision systémique des choses, qui sait porter un jugement sur les situations et les personnes, qui a du leadership et qui a de la créativité, est une personne qui sera armée pour faire face aux métiers d’aujourd’hui, transformés par le digital”.
Le digital : un facteur clé chez IMT-BS
Chez IMT-BS, la dimension digitale est très importante dans la formation. Nous la retrouvons autant dans le programme d’études de nos étudiants que dans notre fonctionnement interne.
Le digital est présent dans tous les aspects de l’enseignement que nous fournissons : cours, semaines pédagogiques, défis et projets avec les entreprises, vie associative...
Un exemple : nos étudiants participent chaque année au Challenge Projets d’Entreprendre qui a lieu sur le campus et durant lequel ils sont amenés à créer en équipes mixtes ingénieurs-managers une startup liée à l’innovation, à la technologie et au numérique, et ce, en une semaine. Cette année, le projet, qui s’est déroulé du 3 au 10 avril, a été entièrement numérisé !
Tu peux en apprendre davantage sur l’aventure du Challenge Projets d’Entreprendre et découvrir les autres projets entreprises auxquels nos étudiants participent en cliquant ici !